samedi 24 avril 2010

Wonderland.

Attention, référence.
Quand « Armageddon » est sorti, il y a plus de dix ans, je me rappelle avoir lu une interview de Michael Bay (je vous avais prévenu, je cite du lourd…) ; il y expliquait que, pour préparer son film, il avait été chaleureusement invité à la NASA, où il avait pu avoir accès à des endroits que nous ne voyons justement qu’au cinéma – pauvres mortels que nous sommes.

J’avais trouvé ça fantastique (l’invitation – pas Michael Bay). Toutes ces choses incroyables que nous aimerions connaître ou essayer un jour et dont les portes s’ouvrent soudain à vous… Un acteur a peut-être la chance de connaître mille vies, mais celui qui créé a quant à lui l’opportunité de rencontrer des gens, d’apprendre des métiers, d’être invité dans des existences auxquelles il n’aurait jamais pu prétendre. Et ça, ça m’a toujours fait rêver – c’est un des plus beaux aspects du travail de créateur !

Niais, mais vrai.

Il se trouve que le chemin vers les salles obscures n’est pas que parsemé de catastrophes et de crétins. En fait, il y a même parfois de grands moments de magie, qui achèvent de vous persuader que putain ! Vous aimez ça. Et que toutes vos emmerdes valaient le coup.

Ah, oui. Vous ne pensiez quand même pas que je n’allais écrire que des méchancetés ?


L’entertainment commence dès votre première année d’école ; en l’espace de quelques mois et dans le cadre d’exercices, vous faites un tour de piste en jet privé, vous partagez le quotidien des coulisses d’une réserve africaine, et vous assistez au doublage d’un film et d’un manga. Vous rencontrez la voix française la plus célèbre qui soit, celle qui a bercé votre enfance, et vous êtes tellement ému en lui faisant la bise que vous en oubliez le principal : maintenant encore, vous vous en voulez de ne pas lui avoir fait enregistrer un message pour votre répondeur !

La vérité, c’est que les gens sont toujours prêts à se plier en quatre, que dis-je, en mille, quand il s’agit de donner un coup de main pour le cinéma. Parce que Dieu merci, dans l’esprit collectif, le cinéma c’est toujours grand, c’est toujours incroyable, et tout le monde adore l’idée de faire partie de l’aventure, ne serait-ce qu’un tout petit peu. Alors hop, ça continue, vous allez accompagner un berger dans le fin fond de la Provence, vous faites des interviews à l’ambassade du Japon, et vous allez même faire un petit tour à Fleury-Mérogis (bon, oui, indubitablement, là c’est quelque chose de relativement accessible à tous. Mais étrangement, je n’avais pas envie de passer par la case prison sans toucher mes deux mille francs, et de me faire violer dans les douches).

Et puis, même à un niveau plus humble, travailler dans l’audiovisuel vous permet tout de même de vous amuser un peu, beaucoup. Vous parvenez à assister à des trucs marrants, à réaliser des rêves d’adolescentes pré pubères idiots ; par exemple, être stagiaire régie sur cette émission musicale que vous adoriez quand vous aviez douze ans et que vous dormiez avec des photos de boys band sous votre oreiller. Le plateau est en fait minuscule, les stars pourrissent leurs loges et vous n’en pensez pas moins, et les animateurs de votre enfance vous parlent comme si vous alliez accepter de leur faire des trucs humides dans les placards. Mais ce n’est pas grave, parce qu’au fond de vous, vous vous éclatez (et n’oublions pas que la régie, c’est plein de bouffe gratuite, hin hin).

Vous harcelez cette actrice qui vous a toujours fait mourir de rire au téléphone, parce qu’elle a des trucs à signer pour son contrat, et vous essayez de rester stoïque quand ce journaliste, qui vous a toujours fait penser à un gentil papa très sérieux, vous fait la bise et vous parle comme s’il vous connaissait depuis dix ans. Parce que vous, bien sûr, vous alliez timidement lui serrer la main. Toutefois, puisque vous parliez chaussures depuis dix minutes avec sa co-animatrice, vous ne vous en sortez pas trop mal – vous êtes plus ou moins blasé, voyez-vous.

La co-animatrice en question qui, d’ailleurs, une heure auparavant, est arrivée en retard sur le plateau, en ayant bien sûr oublié toutes les tenues chez elle. On vous a donc commandé un taxi (ah, les hôtesses d’accueil des chaînes télévisées. Vous les aimez bien, parce que ce doivent être les seules personnes qui sont en bas de l’échelle à vos côtés. Et, en plus, elles doivent vous obéir !) ; l’animatrice, pour le moins confiante et décomplexée, s’est empressée de vous donner son adresse et les clés de son appartement. Et hop ! Vous voilà partie pour les quartiers chics. Vous réussissez à entrer sans encombre, vous papouillez un peu son chienchien, et vous résistez DE TOUTES VOS FORCES à la tentation de fouiller, ou même juste de visiter l’intégralité des lieux. Vous vous contentez d’attraper les robes, de jeter un coup d’œil, et vous repartez au pas de course. Vous courrez dans la rue, des cintres et des paillettes plein les bras, vous avez l’impression de jouer dans un film, et bien entendu, la robe qui sera finalement portée par votre nouvelle meilleure amie est celle qui s’est lamentablement écrasée sur le trottoir – ni vu, ni connu. De toutes façons, elle pourrait toujours râler, vous, vous êtes déjà partie, en quête de sa médecine intime dans la pharmacie la plus proche.

Et puis, parfois, ça arrive – statistiquement, ça ne pouvait qu’arriver : vous vous prenez la honte. Une bonne grosse honte, pas du genre humiliation, non, plutôt du style « j’ai des facultés mentales limitées mais regardez, je vous fais un gros sourire ». Comme la fois où ce type, que vous croisez régulièrement dans les bureaux, vient offrir un livre flambant neuf à votre patronne. Un livre, pfuit, un pavé en vérité, une véritable brique de papier glacé. Vous le prenez et sortez fièrement cette superbe blague : « Wouahou ! C’est de la culture qui muscle ! »
Si, si. Vous l’avez fait. Je l’ai fait. Oups.
Comment étais-je censée savoir que le monsieur en question était un très, très célèbre photographe ? Et que ce livre, qu’il venait de signer, n’était autre qu’un retour sur sa longue et glorieuse carrière ? De plus en plus mortifiée au fur et à mesure que vous tournez les pages et que vous découvrez des portraits incroyables de légendes internationales, vous vous dites que mouais, si vous comptiez parler culture avec l’artiste la prochaine fois, c’est râpé.


Vivement que vous ayez votre Oscar : vous aurez l’air moins con !

1 commentaire:

  1. Hé ben, si déjà il t'est arrivé tout ça dans ta courte (pour l'instant) vie d'apprenti réalisatrice, on peut aisément dire que tu as vécu déjà 100 fois plus de truc que moi, en tout cas, c'est vraiment drôle à lire comme toujours, et j'aime bien le côté "le diable s'habille en Prada", je t'imagine en plan de caméra dans tes différentes activités et j'avoue que ça rend plutôt bien, profite de ton expérience et écris nous un scénar de le diable s'habille en Prada croisé avec un mon idole mais pour la France :)

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