mercredi 16 mai 2012

The Party.

Aujourd’hui commence le 65ème Festival de Cannes. Cela méritait bien un article… (Quelle originalité ! Quelle audace !)

(La musique du « Petit Dinosaure » commence.)


Depuis environ deux mois, tout le monde s’évertue à vous poser LA question : irez-vous au Festival de Cannes cette année ?
Beeeuuah… non.
Vous n’avez pas de court-métrage à y présenter, donc pas d’accréditation, et encore moins d’argent. Au revoir palmiers, croisette, soleil ! Au revoir vieux riches, starlettes et scientologues ! Au revoir le cinéma, aussi…

La vérité, c’est que vous êtes très triste. Vous adorez le Festival de Cannes ! Quand vous n’y êtes pas, vous avez l’impression qu’une grande fête a lieu sans vous. Bon, quand vous y êtes aussi, en fait. Mais le lecteur intelligent aura compris l’idée.

D’accord – vos origines y sont peut-être aussi pour quelque chose. Vous avez grandi dans une ville où il ne fait jamais beau, et vous vivez à Paris. Le simple fait de passer dix jours au bord de la Méditerranée, entourée de restaurants qui proposent des fruits de mer et de la bouillabaisse, vous rend bêtement heureuse.

Toutefois… il n’y a rien à faire : vous aimez faire la queue pendant des heures en plein soleil pour essayer d’aller voir un film qui, de toute façon, sortira dans quelques mois. Vous aimez manger un panini insipide assise sur une bordure de trottoir en regardant passer tous les gens portant une accréditation autour du cou. Vous aimez flâner dans les allées du Marché du Film en volant des posters d’œuvres improbables à droite et à gauche, afin de décorer vos toilettes en rentrant. Vous aimez passer devant le tapis rouge à l’heure de la montée des marches, et sentir la fébrilité ambiante. Vous aimez aller manger un cookie au Kinder entre deux projections dans le petit coffee shop en face du Palais des Festivals. Vous aimez mettre votre réveil à neuf heures dans le but d’aller à la séance de onze, puis vous rendormir quand il sonne en vous disant que vous n’y arriverez jamais. Vous ne vous lassez pas de remonter la Croisette dans tous les sens, d’y repérer ses stars, ses énergumènes, ses présentateurs télé, ses mamies siliconées, ses étudiants plein d’espoir dans leurs costumes H&M, ses happenings. Vous adorez retrouver des amis cinéphiles que vous ne voyez pas souvent, et déjeuner dans des bouis-bouis avec eux en parlant de cinéma à mille à l’heure.
Vous aimez même vous faire refuser l’entrée à une soirée parce que vous êtes en ballerines, pas en talons aiguilles. Tourner pendant des heures à la recherche d’une place de parking. Ou encore participer à la guerre des flyers dans les couloirs du Short Film Corner, luttant sans relâche au jour le jour pour faire remonter votre petite affiche de film.



Vous n’avez pas honte d’admettre que vous aimez ce putain de microcosme puant et suffisant, duquel vous vous sentez pourtant tellement proche. Cannes, tout le monde crache dessus, mais les gens pleurnichent quand ils n’y vont pas.
Il y a sûrement une part de masochisme en vous : nul autre endroit ne peut rendre aussi bien compte de la concurrence. Vingt-trois aspirants réalisateurs au mètre carré, c’est effrayant. Vous relativisez, tout de même : c’est toujours mieux que les cinquante-deux aspirants acteurs.

Pourtant, on ne peut pas dire que l’an dernier, votre festival de Cannes ait été un franc succès. Professionnellement parlant, en tous cas.
La partie « incrustation » fut en revanche une réussite totale. Des plages privées aux salons du Carlton, en passant par la réception de luxe dans les salons de l’ambassadeur au Palais des Festivals, vous êtes entrée partout – même avec vos ballerines. Vous n’avez pas payé un verre, pas un, pendant toute la durée des festivités. De la soirée Martini à la soirée Cointreau, vous avez régulièrement croisé Jean-Pierre Lavoignat et autres Frédéric Beigbeder (en train de se faire monter dessus sur une banquette, toujours). Vous avez assisté à une soirée filmée par Le Petit Journal. On vous a même proposé de la drogue – que de chemin parcouru depuis votre premier festival et les soirées « chips et coca » sur le balcon de la résidence Pierre & Vacances.
Pour autant… Vous n’alliez pas vous jeter sur Thierry Frémaux en lui demandant de l’aide pour votre carrière future. Vous avez votre honneur, tout de même.

Le fait de partir avec votre petit-ami n’a pas vraiment aidé. Essayez un peu de faire une soirée au bras d’un apprenti réalisateur de sexe masculin ! Vous ne serez rien d’autre que la potiche en robe du soir qui accompagne le monsieur. La prochaine fois, vous vous fabriquerez une pancarte : « Je suis réalisateur aussi. Arrêtez de regarder mes seins, ma bande démo est mieux ».

Il n’y a rien à faire – vous donneriez quand même n’importe quoi pour passer ne serait-ce qu’une journée à Cannes. Rien qu’une toute petite, minuscule journée. Même juste cinq minutes, si elles s’écoulent en compagnie d’Ewan McGregor. Ou simplement deux minutes, juste le temps d’acheter un magazine de cinéma avec un t-shirt en cadeau dedans.
S’il te plaît, dieu des jeux-concours, aide une petite réalisatrice perdue !

De là où vous êtes, même la gare de Juan les Pins a des allures d’Hollywood…



1 commentaire:

  1. Bon ,je te ramènerais un Premiere avec son t-shirt .
    ( j'adore le commentaire désabusée des soirées : " Arrêtez de regarder mes seins, ma bande démo est mieux » . Ca pourrait être pire Jennifer : tu pourrais être moche , porter des lunettes et avoir une jambe plus courte que l'autre ... )

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